Critique et analyse cinématographique

Anima 2014 – « Le Vent se lève » de Hayao Miyazaki

Pour son ultime film – du moins, selon ses affirmations récentes – Hayao Miyazaki s’éloigne de ses fantaisies oniriques très ancrées dans la culture mythologique japonaise, pour livrer un film plus réaliste et d’inspiration plutôt européenne, sans pour autant changer de thèmes et d’obsessions.

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Dans Le Vent se lève, Miyazaki s’intéresse à la vie et à la carrière de Jiro Horikoshi, ingénieur mécanique qui conçut les plans du chasseur Zero, le tristement célèbre avion kamikaze de Pearl Harbor. Si les raisons de cet intérêt sont en partie familiales – son père fabriquait des pièces détachées de l’avion, sa mère était tuberculeuse tout comme la femme d’Horikoshi,… – on voit aussi très bien le lien entre le cinéma de Miyazaki et l’aspiration constante de l’homme à toucher le ciel (Porco Rosso, Le Château ambulant,…).

Ce rêve de voler est à la base même du film, qui n’est en cela pas si éloigné des œuvres plus « fantaisistes » de Miyazaki. C’est d’ailleurs dans ses scènes de rêves, dans lesquelles l’idole de Horikoshi, l’italien Caproni, le conforte dans l’obsession passionnelle qu’il voue à son métier, que Le Vent se lève trouve sa quintessence, résumée par le vers de Paul Valéry – prononcé en français –, « Le vent se lève, il faut tenter de vivre ». Perchés sur des avions fendant l’air, Horikoshi et Caproni y défient les lois de la gravité et se trouvent à chaque fois au centre d’un tourbillon virtuose que figurent des plans uniquement permis par l’animation.

C’est d’ailleurs le grand sujet du film : ces personnages en déséquilibre constant qui se tiennent à la barre d’un train durant un tremblement de terre, qui manquent de tomber d’un balcon en tentant d’attraper au vol un avion de papier. Ce sont ces mêmes personnages qui veulent mener de front leurs passions professionnelles et amoureuses (Jiro) ou qui choisissent de profiter pleinement d’un amour bref, au détriment de la vie même (sa femme Nahoko).

Derrière cette esthétique et ce ton de fresque virevoltante, Le Vent se lève cache une réelle réflexion sur ce déséquilibre, sur les limites troubles entre la passion et l’aveuglement. En décrivant le parcours contradictoire et ambigu d’un homme qui construisit un instrument de mort avec les meilleurs intentions, Miyazaki parvient à saisir un peu de ce que signifie être humain.

Thibaut Grégoire

 

Le festival Anima 2014 se déroule du 28 février au 9 mars à Flagey

Plus d’infos sur le site du festival

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